Par un arrêté du 27 août 2020, le ministère de la Transition écologique a autorisé la chasse de 17 460 tourterelles.
Saisi par deux requêtes de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et de l'association One Voice, le juge des référés du Conseil d'Etat a suspendu, par une ordonnance n° 443482-443567 du 11 septembre 2020, l'arrêté ministériel autorisant la chasse à la tourterelle. Outre l’effet immédiat de cette décision, qui permet de stopper la campagne de chasse débutée le 29 août, celle-ci pourrait aussi constituer un précédent en se fondant sur le principe de précaution.
Pour suspendre l'autorisation, deux conditions devaient être réunies : une condition d'urgence et un doute sérieux sur la légalité de la décision.
La condition d’urgence était remplie puisque le quota n'était pas encore atteint et l'état de conservation de l'espèce le justifiait.
Concernant la condition du doute sérieux, le Conseil d'Etat a caractérisé celle-ci en relevant plusieurs éléments, notamment que :
- la population de tourterelles a baissé de 80 % en Europe entre 1980 et 2015, particulièrement sur la voie de migration couvrant la France.
- le comité d'experts sur la gestion adaptative a recommandé d'interdire la chasse de cette espèce, qui n’a cependant fait l'objet d'aucune mesure de protection spécifique.
- la diminution de 3 % du quota par rapport à la saison de chasse précédente a été uniquement fixé « par application d'une règle de trois fondée sur une approximation de la baisse tendancielle de la population européenne sur les décennies passées » alors qu’une telle baisse aurait dû conduire le Gouvernement à interdire la chasse et non à réduire proportionnellement le quota.
Le juge a prononcé la suspension en se fondant sur l'ensemble de ces circonstances mais aussi sur le principe de précaution.
Le fait que l'ordonnance soit fondée sur le principe de précaution pourrait changer la donne dans les procédures contentieuses portant sur la protection des espèces, car cela signifie que le ministre de l'Ecologie ne pourra plus autoriser la chasse d’une espèce lorsque la science ne permet pas d'apprécier le risque d'une telle autorisation de la chasse pour la conservation des espèces.